Alex Lorette

  • Spectacle vivant / Écrit / Audiovisuel

Aussi long que le silence

Une vieille maison rongée par l’humidité, abritant une famille dont le père a disparu.

Dans la fratrie, c'est la guerre. Le fils aîné brime les petits dès que la mère a le dos tourné. La mère, elle, attend le retour de son mari qu'elle croit toujours vivant. mais une odeur insupportable envahit bientôt la maison.

Le fils aîné décrète que l'air est pollué par un nuage. il prend l'ascendant, séquestre sa famille sous prétexte de la protéger. il cherche surtout à cacher un terrible secret...

Aussi long que le silence résulte d'une commande d’écriture du CED-Wb sur le thème du confinement.

Fiche

Visuel
Année
2023

Extrait

La mère – Il faut faire quelque chose.

 

La tante – Elle est très bonne, cette soupe, vraiment délicieuse, j’en reprendrais volontiers.

 

La mère – Je n’en peux plus de cette odeur !

 

La tante – Le goût me rappelle les soupes que maman nous préparait quand on était petites, la maison était remplie d’une odeur délicieuse, qui chatouillait nos narines, on n’attendait qu’une chose, c’était de passer à table, tu te souviens ?  Je ne suis jamais arrivée à refaire les soupes de maman, mais toi, sans avoir sa recette, au jugé, tu as réussi…

 

La mère – D’où vient-elle, cette odeur ?

 

La tante – Je n’ai jamais été très douée pour la cuisine.  Je cuisine, bien sûr...  Mais je n’y prends pas plaisir.

 

La mère – Il faut qu’on trouve.

 

La tante – Demain, c’est mon tour.  Qu’est-ce qui vous ferait plaisir ?  Je pensais préparer un pain de viande.

 

La mère – Si on ne fait rien, ça va devenir invivable.

 

La tante – Un pain de viande, oui.  Qu’est-ce que vous en dites ?  Si vous ne dites rien, je considère que c’est oui !  Un pain de viande alors…

 

La mère – Vous ne sentez rien ?  Est-ce que je suis la seule à m’en préoccuper ?

 

 

Le fils aîné – Bien sûr que si, on sent.

 

La mère – Il faut faire quelque chose.

 

Le fils aîné – Qu’est-ce que tu veux qu’on fasse ?

 

La mère – Il faut chercher d’où ça vient.

 

Le fils aîné – On trouvera jamais !

 

La tante – Tu pourrais chercher, au moins, plutôt que de traîner toute la journée dans le canapé.  Tu es fatigué ? 

 

Le fils aîné – Je ne suis pas fatigué.

 

La tante – Alors, pourquoi tu traînes dans le canapé ?

 

La mère – On étouffe dans cette odeur.

 

Le fils aîné – Les deux autres ne font rien non plus.

 

La tante – Tu es l’aîné.  Tu pourrais donner l’exemple.  (A la mère) Il a toujours été têtu.  C’est un gentil garçon, mais quand il n’a pas envie, il ne bougera pas le petit doigt.  Quand il était petit et qu’il venait à la maison, je me souviens, c’était pareil…

 

La mère – Tais-toi par pitié !  On n’entend que toi !  Et eux, ils sont bien contents que tu parles.  Ils sont trop heureux de se taire.  Surtout le petit là, qui n’ouvre jamais la bouche, on ne sait même pas pourquoi.

 

La tante – Mais justement, il faut continuer à lui parler, beaucoup, si on lui parle, les mots vont revenir.  (Au fils cadet) C’est à cause de ton papa ?  Ton chagrin est resté collé à l’intérieur, il fait comme des grumeaux dans ta voix ? Laisse-le remonter, ton chagrin, pleure une bonne fois, et tu te sentiras mieux. 

 

Le fils cadet –

 

La tante – Ou alors, il a peut-être mal à la gorge.  On n’a jamais pensé à vérifier.  Peut-être qu’il souffre d’un problème de cordes vocales !  Il faut l’emmener voir un médecin !

 

La mère – Arrête…

 

La tante – Tu as mal à la gorge ?  Je te fais une tisane, si tu veux.

 

La mère – Assez !