Dans la nuit

Eloge de la vulnérabilité

Alors qu’une révolte massive gronde dans les rues de la ville, Anna décide de fêter ses fiançailles dans un bar très chic du centre-ville. Par un concours de circonstances alors que les clients se barricadent dans le bar, Anna se retrouve projetée dans la ville.

Anna est le point névralgique de cette fresque. Elle va vivre tout au long du spectacle une métamorphose où elle transcendera en partie les normes auxquelles elle est assujettie et où ainsi, elle reprendra une forme de pouvoir sur sa vie et la vision du monde qui l’entoure.

Coline a la conviction qu’Anna peut devenir une figure nouvelle, une mise en corps des doutes que nous pouvons ressentir face aux pressions sociales ; devenir un écho presque inconscient à cette révolte et ce désir exprimé aujourd’hui par une partie de la population, celui de se libérer d’une société qui déstructure, marginalise et désoriente. Si certains se soulèvent collectivement, brandissant leurs Volontés en bannière, Anna elle, se retrouve embarquée presque malgré elle dans cette insurrection.

Fille d’une puissante famille riche, elle est brillante et représente un modèle de femme épanouie, elle incarne ce qu’est la réussite dans nos sociétés actuelles. C’est en essayant d’échapper à ce milieu étouffant, pour retrouver un amitié de jeunesse, qu’elle se retrouve plongée dans la rue, la nuit et la débâcle. En voulant respirer, loin des injonctions familiales, elle se retrouve nez à nez avec un monde qu’elle ne connaît pas. C’est le souffle de ce vent qui se lève qui l’amènera à agir différemment. L’expérience de cette nuit sera l’initiatrice de sa propre révolte intérieure.

La rue est ici un lieu anamorphique, à la fois celui de la contestation, de la prise de conscience et de la reconnaissance de l’intime. Il n’y a pas si longtemps, avant que nous soyons isolés par les différentes réglementations sanitaires, dans nos villes, dans nos rues les même métamorphoses de territoires s’opéraient selon qui les traverse, les parcours. La rue était aussi bien réinvestie par les marches et les pensées, que par les mouvements de répression et de violence. La metteuse en scène veut faire de Anna le marcheur de cette histoire, qu’elle soit errante ou déterminée selon les situations qu’elle traverse, m’apparaît comme fondamental. En effet, la question de la réappropriation d’un territoire comme la rue est aujourd’hui brûlante.

Pour autant, Coline a la conviction qu’il ne faut pas être front contre front pour parler de la rage. Elle ne souhaite pas représenter le conflit, la foule, la bataille, de manière directe. Bien au contraire, elle cherche dans son travail le développement d’une
poétique du fragment, du souvenir et de la bribe. C’est par sa périphérie que Coline souhaite faire survenir la question de la violence, en particulier grâce à son contre- pied, le concept de défense. C’est par ce biais là, à son sens, que l’exploration n’en sera que plus forte. Coline veut interroger notre vulnérabilité. Démontrer pourquoi cette vulnérabilité aujourd’hui est en passe de devenir synonyme de force et d’ardeur.

Dans la nuit, impose une esthétique ancrée dans l’incarnation où l’obscurité deviendra un révélateur de nos capacités de défenses. Il y a également la volonté forte de mette en lumière les questions de défenses individuelles et citoyennes, d’impliquer les spectateurs de manière active. Soulevant la question délicate et complexe de l’emploi légitime ou non de la violence.

C’est en expliquant aux spectateurs comment se défendre dans tel ou telle situation que nous ferons émerger le caractère violent des situations familiales et insurrectionnelles. Je désire ainsi, par la mise en écho de l’intime et du collectif, mettre au centre de ce travail d’écriture un questionnement solide et qui nous concerne tous: contre quoi, contre qui et comment sommes nous amenés à nous défendre ?

 

Distribution : 

Jeu
Anaïs Aouat
Amel Benaïssa
Michele de Luca
Thomas Dubot
Aline Mahaux
Emilie Maquest
Mehdi Zehknini

Création lumière
Amélie Gehin
En collaboration avec Gwen Laroche

Création son
Marc Doutrepont

Scénographie
Sophie Carlier,
assistée de Noémie Warion

Régie générale
Yorrick Detroy

Stagiaire mise en scène
Clara Bellemans

Création costumes
Claire Farah

Dramaturgie
Héloïse Ravet

Texte
Louise Emö

Mise en scène
Coline Struyf

Conseils artistiques
Selma Alaoui
Emilie Maquest

Visuels
Bruno Tracq

Fiche

Visuel
Année
2021
Production
Mariedl
Co-auteur.trice(s)
Louise Emö