Paroles du mythe, entre passé et présent

Le point de départ de la transmission, c’est peut-être une histoire. L’histoire qu’une femme - ou un homme - raconte à son enfant pour l’endormir. Elle lui parle d’un héros, et lui donne ce faisant un modèle auquel s’identifier. Elle lui dit qu’il faut être courageux, et lui transmet des valeurs. Elle colore l’histoire de son accent, son vocabulaire propre, et lorsqu’elle ne parle pas la manière dont elle se tient continue à raconter un certain rapport au monde que l’enfant enregistre également. Tout cela est bien connu des théories relatives à la transmission culturelle. Théories dans lesquelles, bien souvent, l’individu voit son rôle réduit à celui d’un réceptacle : en lui des contenus sont déposés, conservés et, plus tard, reproduits. Et cependant, y a-t-il jamais eu une transmission qui se soit passée ainsi ? Puisque la transmission est portée notamment par les histoires, c’est d’une histoire qu’il sera question ici. Une histoire mythique qui nous vient de loin : la descente aux enfers d’Inanna. Les mythes, objet de recherche classique des anthropologues, sont plus rarement étudiés par les sociologues. Il est vrai qu’en raison de leur apparence atemporelle ils semblent échapper aux dynamiques sociales. Pourtant, c’est au cœur de celles-ci qu’ils se forment et se transforment au fil du temps, reflétant en miroir les tensions qui traversent les contextes dans lesquels ils circulent. Et si les modalités spécifiques de leur transmission ne peuvent être généralisées à l’ensemble des biens culturels en circulation, elles éclairent particulièrement bien le processus évolutif auquel est soumis, au cours du temps, tout récit. Cet article est structuré en trois temps. Dans un premier temps, nous nous pencherons sur une version ancienne du mythe la descente aux enfers d’Inanna. Nous en présenterons le contenu, et dirons quelques mots des significations qui lui sont associées. Dans un second temps, abordant tour à tour certaines des initiatives qui en sont inspirées, nous nous pencherons sur la manière dont ce mythe est réinvesti aujourd’hui. Ceci nous amènera, dans un troisième temps, à nous interroger sur la face cachée de ce qui est désigné par le concept de transmission.

Fiche

Année
2009
Édition
Presses universitaires