DOUX BISOUS A MOSCOU

Une si gentille famille française, parachutée sur la planète soviétique à l'ère Brejnev, et qui ne demande qu'à s'immerger en eaux profondes pour y vivre une parenthèse inédite. Que peut-il donc y avoir, de l'autre côté de ce "rideau de fer", sans doute bien différent de tout ce que l'on raconte? On a lu et relu tout Custine, Alexandre Dumas, Leon Zitrone et Tintin au Pays des Soviets. Sans oublier John Le Carré, bien sûr.  Il ne sera pas déçu, Eric, le chef de la troupe. Bien qu'il n'ait aucun titre pour se lancer dans des aventures rocambolesques, la vie quotidienne va, elle, s'occuper de lui et des siens, à sa façon. On est en pleine guerre froide, ça, il ne l'oublie pas. Mais qui donc pourrait s'intéresser à un petit chef de famille nombreuse qui va simplement faire son travail de petit ingénieur expatrié?  Qui d'autre que le "bon" KGB... qu'on ne présente plus ? Cette grosse araignée noirissime et suprêmement intelligente qui dorlote à sa façon tous les moucherons tombés dans sa toile sans limites. Sans les priver, toutefois, de la découverte du grand pays Russe, de ses beautés, de ses richesses et de son immense culture, ni de savourer ses doux, et moins doux bisous, fort heureusement.      

Fiche

Visuel
Année
2017
Édition
CADMOS

Extrait

PÂQUE RUSSE A DONSKOÏ

La neige glacée craquait et crissait sous ses pas, un peu comme la meringue qu'on écrase. L'air piquait et brûlait à chaque respiration. Par moins quarante, ce soir-là, il ne fallait pas plaisanter avec les éléments. Mais il était presque joyeux, emmailloté dans sa pelisse marron glacé en agneau retourné surmontée d'une chapka simplette en lapin de Sibérie, qui coiffait comme elle pouvait son cerveau en ébullition, comme un vrai samovar poussé à fond.
Eric se retourna soudain, malgré lui, pris d'une sensation bizarre d'être observé. Mais qui donc se posterait derrière un arbre, ou même enfoncé dans une improbable Jigouli de service, moteur arrêté, pour le guetter, au risque d'être congelé à mort au bout de trois minutes ?
Il avait encore un peu de chemin à faire pour arriver au Monastère de Donskoï, à travers un très petit bois tout à fait insolite, au centre de ce Moscou où la campagne s'invitait discrètement comme pour rappeler que la Russie est bien faite de steppes et de forêts. Les lumières colorées se faisaient plus vives et les premiers chants liturgiques se faisaient entendre au loin.
Ludivine, sa belle et digne épouse, n'avait pas voulu l'accompagner, pour ne pas laisser seuls les enfants qui auraient bien d'autres occasion de faire connaissance avec la festivité. Elle, qui s'apprêtait à réjouir tous ses amis Russes avec un concert privé, la semaine prochaine, et se donnait à fond à son piano......