Un amour classé X ... XL

Un homme et une femme d’âge mûr sont inscrits sur un site de rencontres. Elle, avec ses multiples activités et son caractère farouchement indépendant, n’aurait pourtant pas besoin d’un compagnon à qui elle aurait peu de temps à consacrer. Lui, l’original un peu fou, le timide maladroit, rêve d’un amour intense et durable.

Ils décident de se voir et de faire plus ample connaissance. La magie opère quand ils se rencontrent. Et très vite (trop vite ?), ils se retrouvent embarqués dans une histoire … classée X très charnelle voire torride … à ne pas mettre entre toutes les mains…enfin presque.

(Pour 4 comédiens : 2 hommes, 2 femmes, durée : 1 heure 20.)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Fiche

Année
2022

Extrait

SCENE 1 : ISABELLE et MARIE

 

(Au lever du rideau, Marie et Isabelle boivent un café. Marie manque de s’étrangler.)

MARIE. – Toi sur un site de rencontres, Isa ? Mais enfin, qu’est-ce que tu cherches ?

ISABELLE. – Un homme.

MARIE. – Un homme ?

ISABELLE. – Mais oui, Marie, et ça n’a rien d’extraordinaire.

MARIE. – Si. Toi, chercher un homme, un homme !

ISABELLE. – Quoi, Marie ? Je n’en ai pas le droit ?

MARIE. – Si, là n’est pas la question mais depuis pratiquement dix ans que je te connais…

ISABELLE. – Dix ans oui, depuis mon divorce et que je suis venue m’installer dans ton immeuble.

MARIE. – Mais il ne t’en fallait plus d’homme. Tu es tombée sur la tête ?

ISABELLE. – Presque.

MARIE. – Comment ça « Presque » ?

ISABELLE. – Mon accident de voiture d’il y a deux mois m’a fait réfléchir : si j’avais été blessée, personne n’était là pour m’aider.

MARIE. – Mais je suis là, moi.

ISABELLE. – Tu oublies que j’ai déménagé depuis quatre ans et que nous habitons à présent à 40 kilomètres l’une de l’autre.

MARIE. – Mais tu sais bien que je me déplacerais pour toi.

ISABELLE. – Mais pas tous les jours, enfin. Il faut être réaliste.

MARIE. – Oui, c’est juste mais un homme, un homme, ça ne te ressemble pas, Isa !

ISABELLE. – Je te l’ai dit : avec l’accident, c’est une prise de conscience : un homme me soutiendrait.

MARIE.  – Soit mais après ton divorce, tu n’en voulais plus.

ISABELLE. – Oui mais depuis de l’eau a coulé sous les ponts.

MARIE. – Et chassé tes mauvais souvenirs ?

ISABELLE. – Peut-être pas mais le moment est sans doute venu de retenter le coup.

MARIE. – Retenter le coup ? Mais tu as dit et répété que tu ne pourrais plus vivre avec un homme. Tu es tellement indépendante.

ISABELLE. – Vivre avec un homme tout le temps, non, mais de temps en temps, pourquoi pas ?

MARIE. – Et tu ne pouvais pas le rencontrer normalement, Isa ?

ISABELLE. – Ce…ce n’est pas arrivé ou alors en tout cas, ce n’était pas ce que j’attendais.

MARIE. – Tiens mais alors tu avais rencontré quelqu’un ? Tu ne m’as rien dit.

ISABELLE. – Non, parce que je suis discrète sur ma vie privée, Marie.

MARIE. – Privée au point de ne pas tout me dire ? Tu ne m’as pas fait confiance.

ISABELLE. – Si, je te fais confiance. La preuve : je te dis maintenant que je me suis inscrite sur un site.

MARIE. – Ce que je ne comprends toujours pas parce que tu te rappelles de ce qui nous a rapprochés ?

ISABELLE. – Mon intérêt pour l’astrologie.

MARIE. – Et quand j’avais réalisé ton thème astral, j’y avais vu que tu te suffisais presque à toi-même. Donc un homme ?

ISABELLE. – Eh oui, un homme.

MARIE. – Et en plus sur un site. Et comment fonctionne-t-il ce site ? Parce que tu sais que moi, je n’y connais rien.

ISABELLE. – Eh bien, on te propose des profils avec photos le plus souvent, et tu peux envoyer un like.

MARIE. – Un like ?

ISABELLE. – Oui, ça revient à dire que tu l’apprécies.

MARIE. – Ah bon ? Tu me montreras.

ISABELLE. – Pourquoi ? Tu veux aussi t’inscrire ?

MARIE. – Moi ? Sûrement pas. Qu’est-ce que j’y chercherais ?

ISABELLE. – Mais un homme, un homme !

                                                                         

NOIR

 

SCENE 2 : JULIEN et OLIVIER

 

OLIVIER. – Si elle accepte de venir ici, je peux l’emmener dans ton petit salon ?

JULIEN. – Oui, pas de problèmes. D’habitude, il sert plutôt à des rencontres politiques mais…

OLIVIER. – En terrasse ou à l’intérieur, ça risque d’être bruyant et trop visible.

JULIEN. – Pourquoi ? Tu as peur d’être vu, Oli ?

OLIVIER. – Non mais tu me connais, je suis assez timide.

JULIEN. – En tout cas, depuis ton divorce, ce sera la première fois.

OLIVIER. – Ici, oui mais j’en ai quand même rencontré trois ailleurs.

JULIEN. – En quatre ans, la moyenne n’est pas très élevée.

OLIVIER. – Je n’ai rien d’un Dom Juan, Julien. Enfin, il y a eu Mélanie quand même.

JULIEN. – Combien de temps au total ?

OLIVIER. – Une bonne année et demie…par épisodes.

JULIEN. – Des épisodes que j’ai plutôt suivis de loin.

OLIVIER. – Tu l’as vue en photo. Ce n’était déjà pas mal.

JULIEN. – Mais assez flou quand même. Pas le grand amour, hein, Oli ?

OLIVIER. – Pas d’amour du tout surtout, c’était trop frais après mon divorce.

JULIEN. – Il faut te secouer maintenant. Depuis combien de temps es-tu inscrit sur le site ?

OLIVIER. – Un an et demi. C’est toi qui m’y as poussé. Et David aussi.

JULIEN. – J’ai rencontré Alice comme ça et nous sommes mariés : la preuve que ça peut marcher.

OLIVIER. – Oui, Julien, mais David aussi a rencontré sa femme sur le site. Ils se sont mariés et tu connais la suite.

JULIEN. – Ils se sont déjà séparés. C’est vrai que sa Lucie, c’est un fameux chameau.

OLIVIER. – Qui ne bosse pas beaucoup.

JULIEN. – Très peu, c’est vrai. Elle ne fait même pas la cuisine.

OLIVIER. – Bref, vous m’avez tous les deux incités à m’inscrire et pour l’instant, je ne vois que cinquante pour cents de réussite.

JULIEN, souriant. – Cinquante pour cents : c’est pour ça que j’ai trouvé ma moitié.

OLIVIER. – Je n’ai pas l’envie de me remarier mais plutôt que d’échanger des dizaines de messages …

JULIEN. – Tu t’es dit que rien ne remplacerait une rencontre.

OLIVIER. – Surtout qu’elle habite aussi ici donc…

JULIEN. – Tu passes tout de suite du virtuel au réel. Si tu comptes un jour lui faire l’amour, ça vaut mieux.

OLIVIER. – Je n’en suis pas encore là.

JULIEN. – Il faut penser tout de suite au côté agréable, ça motive. Mais j’ai déjà une mauvaise nouvelle.

OLIVIER. – Laquelle ?

JULIEN. – Je ne loue pas de chambre.

NOIR

 

SCENE 3 : MARIE

 

MARIE, au téléphone. – Oui, Ingrid. Figure-toi que Isa s’est inscrite sur un site…Si, je te dis que si…Oui, super indépendante…Et pourtant…Elle m’a montré, il s’appelle Olivier…Elle en a déjà aimé quatre en une petite semaine…Si : aimé, enfin ça porte un autre nom…oui, un like, c’est ça…Tu connais ça, toi ?... Je suis vraiment une béotienne, moi…Et tu sais le plus incroyable ? J’ai été revoir mes notes qui dataient de 10 ans…Eh bien, je ne me rappelais plus que je lui avais dit qu’elle allait rencontrer un gars…Enfin, ce n’est pas le premier mais ça, c’est une autre histoire…Oui, je t’expliquerai…Oui, eh bien ? le gars qu’elle préfère dans les quatre qu’elle a aimés…oui likés si tu préfères… Eh bien, je te le donne en mille, j’ai vu sa photo …  Oui, Olivier … et ça correspond physiquement au gars que j’avais décrit il y a dix ans… Mais pourquoi tu m’appelles Madame Soleil ?

NOIR

 

SCENE 4 : ISABELLE et OLIVIER

 

(Isabelle et Olivier sont chacun derrière leur ordinateur. Ils chattent.)

ISABELLE. – Bonjour Olivier, j’ai bien reçu votre message.

OLIVIER. – Que j’ai écrit parce que vous m’avez adressé un like.

ISABELLE. – Oui, c’est comme ça qu’on procède, non ?

OLIVIER. – Sans doute oui, c’est donc que je vous plais ?

ISABELLE. – Physiquement oui. Après, pour la personnalité, il faut voir, bien sûr.

OLIVIER. – Et c’est ce que je vous propose : nous voir. Une rencontre nous en apprendra plus que toute une série de messages.

ISABELLE. – D’accord. Et où ?

OLIVIER. – Puisque nous habitons la même ville, je vous propose de nous y rencontrer.

ISABELLE. – Bonne idée. A quel endroit ?

OLIVIER. – Au café « Le rêve de Julien », ça me paraît aller de soi : rêvons.

ISABELLE. – Rêvons alors : je connais l’endroit et je l’apprécie. Quand se verrait-on ?

OLIVIER. – Demain, onze heures, ça vous irait ?

ISABELLE. – Parfait. A demain, Olivier.

OLIVIER. – A demain, Isa. Ah, j’oubliais : Isa, c’est évidemment pour Isabelle ?

ISABELLE – Oui. Vous avez bien deviné, inspecteur Olivier.

OLIVIER. – Je ne menais pas l’enquête, c’était facile.

ISABELLE. – Attention, inspecteur, je vous préviens déjà : je ne suis pas une fille facile.

OLIVIER. – Heureusement : si j’en cherchais une, je serais sur un autre site.

ISABELLE. – Quel genre de site ?

OLIVIER. – Comment le caractériser ? Disons un site olé olé.

ISABELLE. – Un site espagnol ?

OLIVIER, souriant. – Non, je ne comprendrais pas le texte.

ISABELLE. – Mais en voyant les photos de femmes dénudées, vous comprendriez ce qu’elles veulent.

OLIVIER. – Ce n’est pas ce que je recherche puisque je ne suis pas sur ce genre de site justement.

ISABELLE. – IL y a quand même un point de comparaison entre ce genre de site olé olé et moi.

OLIVIER. – Ah bon ? Lequel ?

ISABELLE. – Le matin, je bois un café… au lait.

 

NOIR

 

SCENE 5 : JULIEN

 

JULIEN, au téléphone. – Oui, chou. Il va arriver ici avec sa dulcinée…Si, je leur ai réservé le petit salon du fond …. C’est une première rencontre…J’ai dit dulcinée ainsi, je n’allais pas dire sa petite amie, ils ne se connaissent pas encore…. Comment je le sais ? Il vient de me téléphoner… Tu ne devineras jamais : il stresse à mort…ça ne t’étonne pas ? Forcément, tu as appris à le connaître… Il a très mal au ventre… Oui, comme un enfant qui ne veut pas aller à l’école…Pourtant ici, c’est peut-être pour rencontrer une future…maîtresse…Oui, j’arrête de faire l’imbécile…Mais maîtresse à l’école, c’était trop facile…Oui, il a mal…Depuis qu’il souffre d’intolérance au lactose, il est fragile…Mais oui, je vais le mettre en confiance, bien l’accueillir…Un petit cadeau ? Oui, des chocolats…au lait. (Il se met à rire.)

 

NOIR

 

SCENE 6 : OLIVIER, ISABELLE et JULIEN

 

OLIVIER, faisant signe à Isabelle de s’asseoir. – Installons-nous ici. En terrasse, nous ne serons pas tranquilles et puis il fait chaud.

ISABELLE, s’asseyant. – C’est vrai qu’il fait plus frais ici mais la terrasse, quand même, c’est agréable.

OLIVIER, même jeu. – Et j’ai oublié mes lunettes de soleil. Elles sont restées dans ma voiture.

ISABELLE. – Ce n’est pas grave.

OLIVIER, se relevant. – Je vais retourner les chercher. Comme ça, nous pourrons nous installer en terrasse.

ISABELLE. – Non, ça ira.

OLIVIER. – C’est vrai que ça me revient maintenant : elles sont restées chez moi. (Il se rassied mais en manquant de s’asseoir à côté de la chaise.)

ISABELLE, en aparté. – Il a vraiment un côté gaffeur.

JULIEN, arrivant. – Alors, qu’est-ce que je vous sers les amoureux ?

OLIVIER. – Amoureux ? Ne brûlons pas les étapes. Un rosé.

ISABELLE. – Bonne idée. Pour moi aussi alors.

JULIEN. – Vous voyez : déjà un point commun (Puis en aparté.) Relax, Oli et rassure-toi, pas de lactose dans le rosé.

ISABELLE. – Il en faut d’autres.

JULIEN/OLIVIER, en chœur. – D’autres rosés ?

ISABELLE. – Non, d’autres points communs.

JULIEN/OLIVIER, en chœur. – Ah !

JULIEN, repartant. – Je vous ramène ça tout de suite.

ISABELLE. – Les points communs ?

JULIEN. – Non, les rosés.

ISABELLE, à Julien. – Je peux vous poser une question ?

JULIEN. – Bien sûr.

ISABELLE. – Sur l’enseigne, en-dessous du rêve de Julien, il est écrit en plus petit « La bergerie », pourquoi ?

JULIEN. – C’est parce que je m’appelle Julien Leloup. Alors, Leloup dans la bergerie, je trouvais ça marrant, surtout que ma femme s’appelle Alice Berger. (Il repart.)

OLIVIER. – Merci pour tes explications. (Puis à Isabelle.) Alors que dit-on dans des circonstances pareilles ?

ISABELLE. – Je vous laisse l’initiative. Je vous écoute, enfin non, si on se tutoyait, ce serait plus sympa, non ?

OLIVIER, qui va se toucher régulièrement le ventre. – Oui, plus sympa. En fait, je ne sais pas s’il faut parler de nos parcours respectifs.

ISABELLE. – Non, enfin, je ne sais pas. Pourquoi ?

OLIVIER. – Nous nous rencontrons aujourd’hui, c’est ça qui est important, ne parlons pas forcément du passé.

ISABELLE. – D’accord pour vivre dans le présent mais il y aura un minimum quand même.

OLIVIER. – Nous savons que nous ne sommes pas forcément nés pour toi sous le signe de la vierge et moi celui du puceau.

ISABELLE. – Presque.

OLIVIER. – Presque ?

ISABELLE. – A quelques jours près, j’aurais pu naître sous le signe de la Vierge.

OLIVIER. – Alors moi, avec la meilleure volonté du monde, je n’aurais jamais pu naître sous le signe du puceau. C’était juste une image pour dire…

ISABELLE. – Que nous avons bien sûr déjà eu une vie affective et sexuelle avant de nous rencontrer.

JULIEN, apportant les verres et voyant qu’Olivier se touche le ventre. – Et voilà les rosés…de Provence dont nous avons le climat depuis quelques jours. (En aparté à Olivier.) Et ne te touche pas le ventre, relax, Oli, relax.

OLIVIER. – Merci.

ISABELLE. – Merci. (Puis en aparté.) Mais qu’est-ce qu’il a à se toucher le ventre ?

JULIEN, repartant. – Bonne dégustation.

ISABELLE/OLIVIER, en chœur. – Merci.

JULIEN, revenant et qui a entendu. – Une réplique en chœur, c’est bon signe pour les affaires de coeur. Mais je vais te rapporter tes enfants, je les ai oubliés. (Il sourit.)

OLIVIER. – Mes enfants ?

JULIEN. – Les enfants d’Olivier : les olives. Oui, je sais, c’est nul. (Il part.)

ISABELLE. – Pas si nul que ça quand même. Tu le connais bien, Julien ?

OLIVIER. – C’est un ami.

ISABELLE. – Donc tu amènes ici les femmes que tu connais sur le site ?

OLIVIER. – Non, j’en ai rencontré très peu et comme elles n’habitaient pas tout près …

ISABELLE. – Combien de rencontres depuis ton divorce ?

OLIVIER. – Trois en trois ans dont une seule concrétisée avec des hauts, des bas, des ruptures mais ce n’était pas sérieux. Et toi, combien ?

ISABELLE. – Tu es le troisième.

OLIVIER. – Et depuis quand es-tu sur le site ?

ISABELLE. – Une semaine.

OLIVIER. – Trois rencontres déjà en une semaine ? Il n’y a pas à dire : tu rentabilises ton inscription.

ISABELLE. – Surtout que je n’ai pas payé.

OLIVIER. – Ah bon ? C’est vrai que parfois pour les femmes, c’est différent.

ISABELLE. – Oui, j’ai trouvé le bon filon.

OLIVIER. – Le bon filon avec trois rencontres ? Qu’est-il arrivé aux deux premiers ? Comme la mante religieuse, les as-tu dévorés après l’accouplement ?

ISABELLE. – Eh bien, je ne dévore pas mais je mords parfois et surtout si ça ne me paraît pas concluant, je ne donne pas suite.

OLIVIER. – Ah ? Et pour l’instant, donnerais-tu suite ?

ISABELLE. – C’est à voir. Et toi ? (Puis en aparté.) Un peu bizarre avec son ventre mais pas déplaisant.

OLIVIER. – Si j’ai pris la peine de t’écrire après le like, c’est que tu me plais. (Puis en aparté.) Serais-je tombé sur une croqueuse d’hommes ? Charmante pourtant.

JULIEN, revenant et déposant les olives. – Voilà tes gosses. Oui, je sais : c’est toujours aussi nul donc pas de commentaires. Comme j’avais parlé de répliques en chœur comme au théâtre, je quitte … la scène. (Il repart.)

ISABELLE. –  Et le théâtre, justement ? Tu m’as écrit que tu en faisais mais sans vraiment expliquer.

OLIVIER. – Ah ! Eh bien, depuis cinq ans et j’en fais en tant que comédien dans une troupe qui monte une pièce par an.

ISABELLE. – Super ! Moi j’en ai tâté dans le cadre d’ateliers de la Maison de la Culture.

OLIVIER. – C’est justement là que nous jouons. Et j’ai eu l’occasion aussi de goûter à l’improvisation : tu dois inventer tes répliques en répondant au quart de tour.

ISABELLE. – Pas facile donc. ça met du piment. (Puis en aparté.) Si tu savais, c’est ça que je cherche.

OLIVIER. – Voilà, ça pimente. Et toi, ça t’a plu ?

ISABELLE – Oui…et le rosé est bon aussi.

OLIVIER, prenant un air inquiétant. – Et au théâtre, je peux jouer le rôle d’un infanticide.

ISABELLE. – C’est-à-dire ?

OLIVIER, même jeu. – Un homme qui tue ses enfants en devenant même cannibale en les dévorant.

ISABELLE. – Tu m’inquiètes. Comment ?

OLIVIER, même jeu. – Olivier dévorant ses enfants : les olives.

ISABELLE, souriant. – Je ne l’avais pas vu arriver celle-là.

OLIVIER, même jeu. – C’est que tu n’as pas de bons yeux alors.

ISABELLE, même jeu. – J’ai oublié mes lunettes de soleil, comme toi.

OLIVIER. – Juste : c’était pour mieux te voir, mon enfant.

ISABELLE. – Attention de ne pas me dévorer comme tes autres enfants, les olives, alors.

OLIVIER, en aparté. – J’en aurais bien envie pourtant.

ISABELLE, en aparté. – Ce ne serait peut-être pas désagréable.

(Le temps passe. On les voit rire, sourire, visiblement s’apprécier.)

OLIVIER. – Quand fais-tu de l’équitation ?

ISABELLE. – Une fois par semaine, le mercredi après-midi.

OLIVIER. – Le moment où, en tant que prof de français, je suis libre, ça tombe mal.

ISABELLE. – Eh oui, je ne choisis pas.

OLIVIER. – On ne fait pas de l’équitation au moment où on peut passer du temps avec moi, voyons, et je ne transigerai pas là-dessus.

ISABELLE. – Ah bon ? Et pourquoi ?

OLIVIER. – Parce que je suis à cheval sur les principes. (Ils rient de bon cœur.) L’humour, c’est souvent mon cheval…de bataille.

ISABELLE. – Tant mieux, j’aime bien rire. Mais quand je ferais du cheval, tu n’aurais pas de corrections pour t’occuper ?

OLIVIER. – Si mais je m’organise. Le mercredi après-midi, je peux aussi à l’occasion monter en selle mais sur un vélo.

ISABELLE. – Tu roules vite ?

OLIVIER. – Non, c’est du cyclotourisme. Mais je marche aussi.

ISABELLE. – Ah ! Un autre point commun : nous pourrions marcher ensemble, justement.

OLIVIER. – Si la marche peut nous rapprocher, as-tu une autre activité qui puisse le faire également ?

ISABELLE. – Je crains que non. Je me suis mise à l’aquarelle aussi.

OLIVIER. – Et avec l’aquarelle et l’équitation, quand arrive-t-on à te rencontrer ?

ISABELLE, souriant. – Quand je ne suis pas à mes cours de solfège et de guitare.

OLIVIER. – Ces cours-là n’étaient pas mentionnés sur le site, il y a d’autres surprises ?

ISABELLE. – Non, il y a la lecture aussi mais ça j’en parlais, tout comme je disais vouloir partager des activités, des sorties.

OLIVIER. – Mais pas évident quand même de te voir alors. Tu disais aussi sur le site que tu étais indépendante donc…

ISABELLE. – J’ai besoin de moments pour me ressourcer.

OLIVIER. – Et si on ajoute ça à tes activités professionnelles ?

ISABELLE. – Il ne reste parfois pas grand-chose mais tout est une question d’organisation.

 OLIVIER. – Si tu le dis. (Puis en aparté et se touchant à nouveau le ventre.) Le stress revient.

ISABELLE. – De l’organisation puisqu’il faut encore rajouter du temps pour les courses, les tâches ménagères, etc…

OLIVIER. – ça fait beaucoup d’etc… pour peu de temps libres. Et tu arrives à tout mettre en musique ?

ISABELLE. – Oui. J’arrive à suivre mes cours de solfège et de musique justement mais il faut que je travaille à domicile également.

OLIVIER. – Moi, j’ai bien tâté un peu de guitare quand j’étais jeune mais maintenant c’est quasi exclusivement à l’écoute.

ISABELLE. – Et tu écoutes qui ?

OLIVIER. – D’abord toi quand tu me parles.

ISABELLE. – C’est gentil. Et si pour tout mettre en musique, on mangeait également un petit bout ici après tes enfants.

OLIVIER. – Mes enfants ?

ISABELLE. – Les olives, tu as oublié ?

OLIVIER. – Non, mais malheureusement ce n’est pas possible. (Il regarde sa montre.) C’est vrai qu’on n’a pas vu le temps passer.

ISABELLE, déçue. – Pas possible ?

OLIVIER. – J’ai…j’ai rendez-vous avec ma sœur, elle a réservé le restaurant.

ISABELLE, en aparté. – C’est vrai ou il dit ça pour abréger ? (Puis à Olivier.) Oh, c’est dommage !

OLIVIER. – Oui, c’est dommage. Je suis désolé. (Puis en aparté.) Je ne peux malheureusement pas lui faire faux bond.

ISABELLE, en aparté. – Il dit ça parce qu’il n’a pas envie de me revoir ? (Puis à Olivier.) On pourra se revoir ou pas ?

OLIVIER. – Oui, oui, bien sûr. On communique sur le site ? (Il s’est relevé.)

ISABELLE. – Oui, il faudra bien.

OLIVIER. – On se fait la bise ?

ISABELLE. – Oui, bien sûr. (Ils se font la bise.) 

OLIVIER. – A bientôt, Isa.

ISABELLE. – A bientôt, Olivier. (Il part. Elle le regarde, songeuse.) Bizarre quand même ce type, on était bien pourtant. Vais-je le revoir ?

 

NOIR

 

SCENE 7 : JULIEN

JULIEN, au téléphone. – Oui, chou, je crois que ça s’est bien passé même s’il est reparti un peu précipitamment… Il m’a dit en sortant qu’il avait rendez-vous avec sa sœur… Non, je suppose que c’est vrai…En fait, je n’en sais rien… (Il tourne la tête.) Oui, j’arrive pour la commande. … Non mais c’était sûrement positif…Il m’avait dit en arrivant qu’il ne resterait pas longtemps, qu’il ne savait pas quoi dire…Finalement ? Une heure et demie … mais c’est vrai qu’il est reparti assez vite…Non, je n’ai pas entendu grand-chose, ils étaient dans le petit salon…Elle ? Pas mal du tout…beaucoup de charme…Comment pour dire ça, je suis sous le charme, son charme ? Mais enfin chou, que vas-tu chercher ? ... Tu sais bien que je t’aime… Le prouver ? Attends que je rentre, ça va être ta fête.

NOIR

 

SCENE 8 : MARIE

MARIE, au téléphone. – Oui, Ingrid, ça s’est globalement bien passé mais mal terminé… Pourquoi ? Il est reparti subitement alors qu’elle lui proposait de manger un bout…Non, normalement, il n’est pas rentré chez lui…Il avait rendez-vous avec sa sœur… Oui, ça se passait bien : il a beaucoup d’humour mais elle n’a pas tout compris ses jeux de mots…Enfin ça c’est un détail …. Une heure et demie…Oui, elle le trouvait charmant…c’est vrai qu’il l’est … J’ai vu sa photo … Non, tu ne pourrais pas le voir sinon tu devrais t’inscrire sur le site… Tu l’as fait ? Eh bien ça alors ! Mais tu vas tromper Pierre ? … C’est juste pour voir pendant quelques jours … Il n’y a vraiment plus que moi … Non, moi, ça ne m’intéresse pas. Qu’est-ce que je chercherais ? … Un homme, un homme ? Sûrement pas.

NOIR

 

SCENE 9 : JULIEN

JULIEN, au téléphone. – Chou, je t’appelle simplement trente secondes parce que j’ai du monde. … (Il tourne la tête.) Oui, j’arrive, j’arrive. … Oui, Olivier est passé en coup de vent avant d’aller chez la fleuriste…Il a remarqué sur le site qu’elle avait son anniversaire…Et là, j’ai un scoop…Elle l’a déjà invité à passer chez elle…Il a dit qu’il n’aurait pas beaucoup de temps d’ailleurs…Encore aller voir sa sœur ? Non, il m’a parlé d’un scanner à l’hôpital…Oui, c’est tôt pour qu’elle l’invite…Une idée derrière la tête ? Tu ne crois quand même pas qu’ils vont aller jusque-là quand même …. surtout qu’Olivier, c’est un timide, je le connais. Oui, à tout à l’heure. Bisous. (Il raccroche.) Non, pas jusque-là quand même.

NOIR

 

SCENE 10 : MARIE

MARIE, au téléphone. – Oui, Ingrid, j’ai eu des nouvelles…En fait, le soir même il a repris contact sur le site…Il s’est excusé…Oui apparemment, il avait vraiment rendez-vous avec sa sœur…Il aurait voulu la revoir très vite mais elle est partie trois jours avec sa sœur…Oui elle aussi…Oui, un petit séjour de détente prévu… Mais ils vont se revoir aujourd’hui… Chez elle… Oui, c’est son anniversaire … Mais non, je suppose qu’ils n’iront pas jusque-là. Oui…oui, dès que j’ai le prochain épisode, je te rappelle…Mais non, ils ne vont quand même pas déjà aller jusque-là quand même…Mais non, pas jusque-là ! ... Et puis, si vite, ça ne se fait pas !

 

NOIR

 

SCENE 11 : OLIVIER et ISABELLE

 

(On sonne. Elle regarde l’heure, elle va ouvrir.)

ISABELLE, en aparté. – La ponctualité est la politesse des rois. (Elle ouvre.) Bonjour Olivier.

OLIVIER, tenant un bouquet. – Bonjour Isabelle et bon anniversaire.

ISABELLE. – Merci. C’est gentil. (Il ne lui tend pas le bouquet. Il hésite.)

OLIVIER. – C’est…c’est quand même extraordinaire : cinq jours après notre rencontre, c’est déjà votre anniversaire.

ISABELLE. – Nous avions dit que nous pouvions nous tutoyer. Et mon Dieu, ça n’a rien d’extraordinaire.

OLIVIER. – Si, quand même.

ISABELLE. – Mais ne reste pas là comme un empoté, rentre.

OLIVIER, s’avançant. – Empoté ? Mais elles ne sont pas dans un pot, ce sont des fleurs coupées.

ISABELLE, souriant. – Si tu veux me faire sourire, c’est réussi.

OLIVIER. – Je vous…je t’ai dit que je faisais un peu de théâtre, des comédies justement.

ISABELLE. – Alors, donne-moi d’abord les fleurs. (Il les lui tend.) Et pendant que je prends un vase, fais-moi rire.

OLIVIER. – Te faire rire ? Mais ça ne se fait pas sur commande.

ISABELLE. – Eh bien, moi, je te passe commande, fais-moi rire. (Elle sort.)

OLIVIER. – Partie chercher un vase. Et moi, je reste là comme un empoté … sans mes fleurs coupées...Une commande, c’est vite dit.

ISABELLE, rentrant avec un vase. – Et voilà ! Les fleurs, à présent. (Elle les place dans le vase. Celui-ci est posé sur la table.)

OLIVIER. – Quelle rapidité ! Quelle dextérité !

ISABELLE. – Merci pour les compliments mais je ne ris pas forcément, je reste sur ma faim.

OLIVIER. – Mais ce n’est pas la fin, ce n’est que le début.

ISABELLE. – J’espère bien. Allez, raconte-moi quelque chose d’amusant.

OLIVIER. – Je…je ne sais que dire.

ISABELLE. – Inspire-toi d’une pièce que tu connais.

OLIVIER. – Je m’inspire…et j’inspire une bonne fois. (Il respire à fond puis avec emphase.) Souffrez Madame que je m’étonne de votre présence ici…

ISABELLE. – Mais j’habite ici. Et tu me vouvoies encore ?

OLIVIER. – Mais ne m’interromps pas, voyons. Le vouvoiement est nécessaire, c’est une tournure ancienne.

ISABELLE. – Pardon, monsieur le comédien. J’attends donc que les choses prennent…tournure.

OLIVIER. – Voilà, comme tu dis. Je recommence. Souffrez que je m’étonne de votre…

ISABELLE. – Tu as oublié « Madame ».

OLIVIER. – Mais j’allais le dire après. Ne m’interromps pas. C’est déjà suffisamment stressant.

ISABELLE. – Cool, Olivier, cool.

OLIVIER. – Cool donc. J’inspire à nouveau. (Il inspire profondément.)

ISABELLE. – Il ne faut pas faire de la plongée pour autant et rester en apnée trop longtemps. Cool, relax, j’ai simplement envie de sourire pour mon anniversaire.

OLIVIER. – J’y vais.

ISABELLE. – Non, reste ici, tu ne vas pas déjà partir ?

OLIVIER. – Mais non, « J’y vais », c’était une expression.

ISABELLE. – Mais oui, j’avais compris, c’était pour te faire marcher. J’ai envie de participer moi aussi.

OLIVIER. – Souffrez, Madame…

ISABELLE. – Bravo ! Tu n’as plus oublié le « Madame ».

OLIVIER. – Mais ne m’interromps pas voyons sinon je n’y arriverai jamais.

ISABELLE. – Pardon. Je t’en prie.

OLIVIER, après avoir inspiré à nouveau profondément. – Souffrez, Madame, que je m’étonne de votre présence ici…

ISABELLE. – Mais j’y habite, Monsieur.

OLIVIER. – Mais laisse-moi terminer au moins ma première phrase.

ISABELLE. – Je t’ai dit que je participais, Olivier.

OLIVIER. – Soit. … Souffrez, Madame, …

ISABELLE. – Tu as oublié d’inspirer.

OLIVIER. – Mais je n’y arriverai jamais. Surtout que c’est stressant, Isabelle, on se connaît à peine.

ISABELLE. – Depuis cinq jours.

OLIVIER. – Et c’est déjà ton anniversaire, c’est stressant, je suis assez timide, tu sais.

 ISABELLE. – Relax, Monsieur timide. Vas-y.

OLIVIER, après avoir inspiré. – Souffrez, Madame, que je m’étonne de votre présence ici mais la place m’est heureuse de vous y rencontrer.

ISABELLE. – C’est très bien.

OLIVIER, imitant De Funès. – C’est bien, c’est très bien. (Puis en aparté.) Et à replacer pour d’autres éventuelles rencontres.

ISABELLE. – Non, je n’aime pas De Funès.

OLIVIER. – Ah bon ?

ISABELLE. – Oui, je trouve qu’il fait trop de grimaces.

OLIVIER. – Pourtant tout le monde l’aime.

ISABELLE. – Pas moi. Redis-moi ta réplique.

OLIVIER. – Pourquoi ?

ISABELLE. – Je t’ai dit que je participais. Et n’inspire plus.

OLIVIER. – Pourquoi ?

ISABELLE. – Je t’ai dit que je n’aimais pas les grimaces. Et ne répète pas encore « Pourquoi ? »

OLIVIER. – Pourquoi ? J’avais répété « Pourquoi » ?

ISABELLE. – Oui. Alors la réplique ?

OLIVIER. – Elle arrive… (Il inspire.) …  Souffrez, Madame, que je m’étonne de votre présence ici mais la place m’est heureuse de vous y rencontrer.

ISABELLE. – Moi de même, très cher.

OLIVIER. – Très cher ?

ISABELLE. – La tournure est ancienne également.

OLIVIER. – Très cher ? Non, plutôt bon marché.

ISABELLE. – Bon marché ?

OLIVIER. – Oui. D’abord je suis quelqu’un de simple, Isabelle, et je ne suis pas riche.

ISABELLE, en aparté. – ça, ce n’est pas une bonne nouvelle. (Puis à Olivier.) Vous êtes sérieux, très cher ?

OLIVIER. – Retour au vouvoiement ?

ISABELLE. – Mais ça s’accommode mieux avec « Très cher ».

OLIVIER. – Bon marché.

ISABELLE. – Beaumarchais ?

OLIVIER. – Bon marché pas Beaumarchais. Laissons le barbier à Séville et Figaro se marier sans nous immiscer.

ISABELLE, sensuellement. – Mais j’aime bien m’immiscer, très cher.

OLIVIER. – Bon marché.

ISABELLE. – Si tu veux.

OLIVIER. – Si tu veux, je veux. Et voilà. C’est bon ? J’ai été à la hauteur ?

ISABELLE. – Déjà fini ? Non, encore pour mon cadeau d’anniversaire, très cher.

OLIVIER. – Bon marché. J’insiste : bon marché.

ISABELLE. – Et moi, j’insiste aussi : j’ai envie d’une belle improvisation. Parle-moi de ce que tu fais sur les sites de rencontre.

OLIVIER. – Je …cherche des victimes.

ISABELLE. – Des victimes ? Vous me faites peur, très cher.

OLIVIER. – Bon marché. Ne l’oublie pas si tu ne veux pas être la prochaine.

ISABELLE. – La prochaine ? Mais vous me faites vraiment très peur, très …bon marché.

OLIVIER. – La prochaine, oui parce que je suis un collectionneur.

ISABELLE. – Un collectionneur de victimes ?

OLIVIER. – Affirmatif.

ISABELLE, reculant. – Je … j’ai…peur.

OLIVIER, la suivant. – Normal parce que je suis un serial killer.

ISABELLE. – Ne…ne me tuez pas, très cher.

OLIVIER. – Bon marché ! Combien de fois faudra-t-il te le dire ?

ISABELLE. – C’est assez, j’ai compris.

OLIVIER, apparemment dans un état second. – Tu as compris que je repère mes victimes sur les sites, c’est ça ?

ISABELLE. – Oui …oui.

OLIVIER, même jeu. – Donc tu es dangereuse pour moi.

ISABELLE. – Non, non, pourquoi ?

OLIVIER, même jeu. – Parce que tu pourrais me dénoncer.

ISABELLE. – Non, non.

OLIVIER, même jeu. – Tu es sûre ?

ISABELLE. – Oui, oui.

OLIVIER, même jeu. – Arrête de jouer au ni oui ni non.

ISABELLE. – Mais je ne joue pas, très cher.

OLIVIER. – Bon marché, tu le fais exprès ?

ISABELLE. – Mais non !

OLIVIER, même jeu. – Je t’ai dit de ne plus jouer au ni oui ni non.

ISABELLE. – Oui.

OLIVIER, même jeu. – Tu recommences ?

ISABELLE. – Mais non !

OLIVIER, même jeu. – Si : la preuve.

ISABELLE, reculant encore. – La preuve de quoi ? Que vous me faites peur, très cher.

OLIVIER, se calmant. – Allez, détends-toi, ce n’était qu’une improvisation.

ISABELLE. – Oui mais quand même…Je ne te connais pas, moi, alors…

OLIVIER. – Tu m’imagines vraiment en serial killer ?

ISABELLE. – Pas forcément mais on ne sait jamais quand on ne connaît pas les gens.

OLIVIER. – Eh bien, nous allons apprendre à nous connaître.

ISABELLE. – Mais nous connaître normalement : la réalité seulement.

OLIVIER. – Et dans cette réalité, Isa, je ne t’ai pas encore complimentée : tu as une très jolie robe.

ISABELLE. – Elle peut être belle, elle m’a coûté très cher.

OLIVIER. – Bon marché, bon marché.

ISABELLE. – Oui : bon marché, bon marché, elle ne m’a pas coûté très cher.

OLIVIER. – Bon marché, tu n’as pas compris ?

ISABELLE. – Si, si mais ça recommence ?

OLIVIER. – Non, rassure-toi.

ISABELLE. – Je commence à me rassurer mais tantôt j’ai vraiment eu peur. Tu paraissais complètement fou, Olivier.

OLIVIER. – Ce qui est fou, c’est que je dois déjà partir.

ISABELLE. – Déjà ?

OLIVIER. – Il était prévu que je ne fasse que passer. Je dois aller passer un examen…

ISABELLE. – Médical ?

OLIVIER. – Oui.

ISABELLE. – ça ne m’étonne pas.

OLIVIER. – Comment ça, ça ne t’étonne pas ?

ISABELLE. – Côté mental, tout va bien ?

OLIVIER. – Parfaitement bien.

ISABELLE. – Tu es sûr ?

OLIVIER. – Tout à fait sûr : je me glissais simplement dans la peau du personnage et un serial killer doit faire peur.

ISABELLE. – Oui, sûrement. Donc nous pouvons continuer à nous voir ?

OLIVIER. – C’est une bonne nouvelle. En même temps, comme tu m’avais dit de passer chez toi…

ISABELLE. – Oui, mais c’était juste pour voir et comme j’ai trois autres opportunités.

OLIVIER. – Ah bon ? Donc encore un de plus. Mais c’est toi la serial killer.

ISABELLE. – Je suis sollicitée sur le site mais je pense que tu seras mon premier choix.

OLIVIER. – C’est une bonne nouvelle. (Puis en aparté.) Il va falloir m’appliquer et comme elle me plaît.

ISABELLE, en aparté. – Voilà au moins un original, il gagne à être connu.

OLIVIER. – Quand pouvons-nous nous revoir ?

ISABELLE. – Pas trop vite.

OLIVIER. – Trois jours ?

ISABELLE. – Trois jours ? Mais c’est une éternité !

OLIVIER. – Mais tu as dit « Pas trop vite », donc deux jours ?

ISABELLE. – Deux jours ? Mais c’est aussi très long, trop long.

OLIVIER. – Alors demain ?

ISABELLE. – Voilà, demain, ce n’est pas trop vite. Je n’aime pas les gens empressés. (Elle s’approche de son visage.)

OLIVIER, l‘embrassant timidement. – Je …je n’ai pas pu résister.

ISABELLE. – Déjà un bisou ? Mais vous allez vite en besogne, très cher.

OLIVIER. – Bon marché…mes bisous sont bon marché. (Il l’embrasse à nouveau.)

ISABELLE. – Encore ? C’est surprenant mais très agréable.

OLIVIER. – Je file sinon je vais être en retard. A demain, Isabelle.

ISABELLE. – A demain, Olivier. (Il sort.) Il me plaît vraiment. Je sens qu’il m’est déjà… très cher.

NOIR

 

SCENE 12 : MARIE

MARIE, au téléphone. – Oui, Ingrid…Quand elle en parle, elle a l’air déjà très mordue… En fait, le jour de son anniversaire, oui hier, il est parti assez vite…il devait passer un examen médical et en partant…tu ne devineras jamais ? … Non, non quand même pas ça, non ! … Non mais ils se sont faits un petit bisou sur la bouche…En me le racontant, elle était excitée comme une puce… Oui, tu dirais une ado… Et attends : finalement, après son examen médical, il l’a recontactée sur le site et ils ont convenu de reprendre un verre dans la soirée…Eh bien, ils sont retournés au même endroit et tu ne devineras jamais…

 

 

 

 

 

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