Je joue donc j’écris. J’écris donc je joue.

Publié le  03.05.2018

Elle écrit depuis longtemps, très longtemps, pour se libérer, pour accoucher ses pensées, sensations, émotions, interrogations et y voir plus clair ? Sans doute. Ça l’a prise avant d’être actrice. Triturer la pensée en la posant sur le papier, éclaircir la conscience en la transformant en mots, introspecter l’âme en la matérialisant. Se heurter à la difficulté du choix de l’écrit pour coller au plus près de cette pensée avec le ressenti le plus juste du moment.

Pas un carnet intime, pas un journal ami, pas un livret affectif. Sur des feuilles volantes, rassemblées dans une farde et toujours datées. Très important de dater, de pouvoir ensuite resituer lors de fouilles archéologiques nostalgiques.

Puis elle devient comédienne. Elle joue d’abord des auteurs. À l’école elle n’avait travaillé que des auteurs morts. En entrant dans la vie professionnelle elle découvre et interprète des auteurs vivants. Tellement vivants qu’il est possible de boire un coup en leur compagnie et de leur poser des questions sur le fond de leur parole. Tellement vivants qu’ils peuvent s’inspirer d’elle, construire avec elle. Il y en a même qui ont écrit pour elle sans qu’elle les ait jamais rencontrés. Les vivants.

Elle découvre le cinéma, jouer devant une caméra, lire un scénario. Elle découvre cette écriture singulière, descriptive, imagée. Elle a envie : mettre sur papier (ou ordinateur) ce qu’elle voit et ce qu’elle sent. Séquences numérotées, intérieur-extérieur, jour-nuit, lieu, didascalies. Écrire un film.

À partir d’un évènement incongru, d’une situation singulière, qui lui sont arrivés ou qu’elle a observés, elle imagine une histoire dans laquelle elle se projette. Son personnage principal est une femme. Toujours. Elle l’interprètera. Ce caractère n’est pas elle, porte un autre prénom mais a étrangement toujours son âge. Âge qui évolue conjointement au sien au fur et à mesure des versions. Ce n’est pas elle, pas sa personnalité, seuls des traits de caractère transpirent parfois plus ou moins consciemment.

Tout ce qu’elle a écrit ne voit pas le jour, beaucoup de tentatives n’aboutissent pas pour des raisons indépendantes de sa volonté. Si forte pourtant sa volonté. Là elle est en postproduction d’un court-métrage qu’elle a écrit et qu’elle réalise. Dans lequel elle joue, forcément. Elle voit et revoit ses images. Elle entend et réentend ses mots. Elle espère en jouer beaucoup des déclinaisons d’elle-même, à l’infini. Mais l’écriture et la mise en possibilités prennent tellement de temps. Elle recommencera, c’est sûr, bientôt, elle y pense déjà, elle en rêve déjà. Pour l’instant elle va finir cette première concrétisation intégrale. Et la montrer, à un, à deux, à tous ? Elle l’espère, le souhaite, l’attend.

À découvrir aussi

Partir à Brest Sans

  • Fiction
« Je suis venu, j'ai vu, j'ai vaincu, mon micro dans ton *u... Tu te crois sur Radio U ? » MC Abdel, 11 ans et 3 pommes, in Radio Quartiers Live Circus @ Longueur d'Ondes 2018   Pa...

« Une Chambre à soi » sous le soleil – Le billet du comité

  • Fiction
Illustration: couverture de l’édition originale d’ "Une chambre à soi" de Virginia Woolf Myriam Saduis est metteuse en scène et autrice. Membre du comité belge de la SACD, elle fait partie d...

Les collaborations, pour le meilleur et pour le pire

  • Fiction
En tant que scénariste, il arrive fréquemment d’écrire à quatre mains. Que ce soit avec d’autres scénaristes, avec des réalisateurs ou des producteurs. J’ai tout essayé. Et le moins que l’on puisse di...